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De la question des bourses nationales sous Op@le et du respect du droit
Un cadre qui s’impose à tous
mardi 16 janvier 2024
« La comptabilité de l’EPLE s’inscrit dans un cadre réglementé défini par l’article R421-
57 du code de l’Éducation que les différents acteurs de l’établissement doivent respecter. Ils ne peuvent pas s’en affranchir ; ils doivent suivre un ensemble de règles juridiques et techniques qui sont rappelées dans l’instruction codificatrice des établissements publics locaux d’enseignement M9-6. »
Ce droit, essentiel pour la bonne exécution des opérations budgétaires, est parfois méconnu ou, tout au moins, insuffisamment connu des acteurs, générant de ce fait incompréhension et difficultés.
Avant le basculement sous Op@le, l’acte juridique fondant les opérations financières des bourses nationales était le budget ayant passé deux formalités obligatoires : le vote en conseil d’administration et la validation des autorités de contrôle lui donnant son caractère exécutoire.
Depuis le 1er janvier 2020, le cadre réglementaire évolue avec la fin de la gestion des bourses dans le budget à l’occasion du passage à Op@le. Elles sont désormais gérées en compte de tiers (compte 443).
Un comptable public d’EPLE, dans le cadre des contrôles qui lui incombent, qui sont fixés par la loi, en toute indépendance, investi par l’autorité qui l’a nommé, vérifie le fondement juridique des opérations financières qui lui sont proposées avant de les prendre à sa charge, tant en recettes qu’en dépenses, surtout dans des opérations hors budget.
Une instruction codificatrice sans ambiguïté
Selon la M9-6 Op@le, les opérations pour compte de tiers (443) répondent à trois critères cumulatifs :
- Trois intervenants prennent part au dispositif : le tiers financeur (État), l’organisme public (EPLE) et le bénéficiaire final (familles) ;
- L’organisme public ne dispose d’aucune autonomie dans la prise de décision ;
- Le financement du dispositif n’est pas assuré par l’organisme public, mais par le tiers financeur.
Ces opérations financières doivent être justifiées par une convention qui en devient le fondement juridique et qui se substitue ainsi au budget exécutoire. La convention dans ce cas de figure est l’acte juridique opposable, après vote en conseil d’administration et validation par les autorités de tutelle.
Doit-on être juriste avant les juristes - ou l’art de l’accommodement à la règle
Force est de constater que le ministère est peu prolixe sur cette question et que certains services académiques sollicités présentent une argumentation qui interroge.
Les deux arguments principaux présentés sont la présence de deux circulaires : la circulaire annuelle relative aux bourses du 17/08/2023 destinée aux EPLE, et la circulaire destinée aux services académiques du 14/02/2017. Le fait est que la convention citée par la M9-6 n’est opposable que pour des projets portés librement par les EPLE.
Pour rappel, le ministère de l’Éducation nationale est l’auteur de la M9-6, cosignée par le ministère des finances publiques. Au regard du rappel ci-dessus sur les opérations pour compte de tiers, le libre portage est une notion toute relative. Autre rappel savoureux, pour le retour de la paye des AED dans les budgets des EPLE, la gestion par les établissements mutualisateurs est effectué aussi pour compte de tiers (443). Dans ce cas de figure une convention a été diligemment fournie par le MEN. Deux salles, deux ambiances...
Or il est de jurisprudence constante qu’une éventuelle dispense ou dérogation à une disposition réglementaire doit être explicitement prévue par un texte de même valeur juridique ou de valeur supérieure. Ce n’est pas le cas des circulaires mentionnées. Au contraire peut-on lire au renvoi n°4 à la fin de la circulaire annuelle à l’utilisation du compte 443110 et donc à la présence d’une convention, CQFD.
De la responsabilité du comptable public, même s’il est aussi gestionnaire
Enfin, tous ces arguments ne permettent à aucun moment de matérialiser le lien juridique qui lie le comptable public en charge d’un EPLE avec les services de l’État en charge du paiement des bourses et l’EPLE lui-même, ni celui qui pourrait justifier que le comptable donne suite à une demande de versement de l’ordonnateur, dans la mesure où ce n’est pas une opération inscrite dans le budget ou dans une convention exécutoire. Ce dernier par voie de conséquence devient un tiers difficilement identifiable juridiquement.
La même interrogation subsiste au moment d’intégrer dans le budget les titres de recettes intégrant les bourses. Le comptable vérifie la régularité formelle de l’acte fondant la recette, avant sa prise en charge. En d’autres termes, il s’assure que l’autorisation de perception de la recette est justifiée, en la forme, par une pièce (une délibération, une convention ou un jugement selon les cas) fournie à l’appui du titre (question écrite au Sénat n°03025 le 01/02/2018).
En l’absence de fondement juridique, le rejet d’un ordre de recette est par ailleurs dépourvu d’une possible réquisition dans la mesure où, dès que celui-ci l’intègre dans sa comptabilité, le comptable prend personnellement la responsabilité de son recouvrement et qu’il ne peut y avoir de transfert de responsabilité sur ce point avec l’ordonnateur.
Enfin, l’absence de convention laisse le comptable seul avec ses comptes et avec ses soldes. Constater un solde débiteur sur le compte 443x, c’est constater que l’État utilise in fine la trésorerie des EPLE pour une dépense qui, selon l’article 56 de la loi 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une nouvelle école de la confiance, est défini comme étant à la charge de l’État.
Il est intéressant de réfléchir à cette nouvelle école de la confiance à l’aune des prérogatives de tutelle et de contrôle de légalité de nos autorités et aux constats sur les pratiques.